Pour clôturer le festival Irtijal, le compositeur libanais Zad Moultaka a présenté sa dernière création « Diptyques » qui confronte des musiciens professionnels à des amateurs ainsi que l’Orient à l’Occident.

Ce soir-là, sur les planches du Madina, un véritable laboratoire de sons a pris place. Mais, auparavant, Zad Moultaka a tenu à remercier l’ambassade de France qui lui a offert son soutien dans ce projet qui a nécessité un an de travail. Il a par ailleurs invité Olivier Delsalle, directeur du festival d’Île-de-France, à monter sur scène, lequel s’est dit enthousiasmé par cette création musicale qui jette une passerelle entre l’Orient et l’Occident. Le projet, qui associe ainsi 18 instrumentistes ou chanteurs, élèves français du Lycée Racine et 26 autres, élèves libanais de l’Institut de musique de Beyrouth et du Conservatoire national supérieur de musique de Beyrouth, réunis autour d’une œuvre instrumentale et vocale, est l’objet d’une commande spécifique du festival d’Île-de-France à Zad Moultaka. Ayant démarré avec une semaine de résidence à Beyrouth pour les élèves du Lycée Racine (Paris) et ceux de l’Institut supérieur de musique (Beyrouth), elle se poursuivra pour être présentée le 13 octobre dans le cadre du festival d’Île-de-France à l’Institut du monde arabe. La première a donc lieu à Beyrouth, a précisé Delsalle. Et Moultaka d’ajouter: «Tous ces musiciens ont permis de questionner “l’orientalité” ainsi que l’Occident en nous et de créer une nouvelle plate-forme de rencontre.» 

 



En quête de la note inédite 
«Diptyques» est donc un nom qui sied bien à la performance puisqu’il évoque la dualité, voire l’altérité, mais également les instruments doubles que jouera l’ensemble Mejwez. À travers ces courtes «propositions de voyages», dira Zad Moultaka, les morceaux de musique évoquent la mémoire, la transmission, l’exil, la double culture et le bilinguisme. De ses créations pour deux instruments ou voix solistes naîtront un dialogue, un langage musical inédit. Comme dans un miroir, la culture orientale se reflète dans celle, occidentale, et vice versa, offrant à découvrir de multiples facettes jusque-là inconnues.
En effet, dans la première partie du spectacle deux à deux, les musiciens explorent les dimensions de leurs instruments. Armoise pour clarinette et vidéo; Mystère des mystères pour guitare, voix et chant intime pour alto (créations mondiales) ainsi que Saisons pour clarinette, guitare, alto, violoncelle et voix. Au fil des vers du poète palestinien Mahmoud Darwich où s’enchevêtrent ceux du grec Giorgos Séféris, les rencontres se nouent. 
Dans la seconde partie, Calvario, pour guitare et sons fixés, reproduit le chemin de croix sur fond de projection d’images, et c’est enfin l’orchestre franco-libanais – chœur et soliste sous la direction du père Toufic Maatouk de l’Université antonine – qui clôturera, avec la création mondiale Enè Bèki, cette soirée hors du commun qui a charrié avec elle des milliers de tonalités nouvelles. 

 

L’Orient le Jour 14 avril 2012

 

 

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Un nouveau projet immobilier à Beyrouth, Venus Towers, prévoit la destruction d'un port phénicien vieux de 2500 ans. L'affaire a été mise à jour il y a quelques mois notamment par l'écrivaine Marie-Josée Rizkallah, qui vient de lancer un nouvel appel à éviter cette destruction. De leur côté, les promoteurs proposent de drôles de solutions. Nous avons voulu faire le point sur ce dossier. Et nous vous proposons au passage de jeter un œil sur les plans des appartements des Venus Towers, qui, eux aussi, nous posent question.

 

Le port phénicien de Beyrouth égrène ses dernières heures après 2500 ans d’existence: c'est un cri que pousse Marie-Josée Rizkallah sur le site Libnanews, par mail, et via les réseaux sociaux. Elle demande, supplie la presse et les citoyens d'arrêter le massacre. Le massacre de l'identité libanaise, de son histoire, de son héritage.

« Vous qui lisez ces phrases, êtes les seuls garants de notre passé et de notre patrimoine, parce que ceux qui sont censés l’être, depuis la fin de la guerre civile, n’ont fait que le fouler aux pieds de leurs intérêts personnels étriqués. Réveillons nos consciences et unissons nos voix, et dites non à ces géants de bétons et d’acier qui ravagent notre capitale et détruisent la mosaïque culturelle qu’est Beyrouth. »

Les mots sont forts, précis et ils frappent très dur, là où ca fait très mal.

« Il existe une volonté d’abêtir le peuple et de le diviser pour mieux faire régner un régime vampirique empreint de corruption. » Déclare Marie-josée Rizkallah. « Il est clair que le Liban croule sous le poids de problèmes d’ordre économique, social, politique, et que ses citoyens vivotent dans des conditions dérisoires les incitant à partir pour se frayer une voie dans d’autres contrées. Mais le réel fléau, la base de tous les malheurs écopés par ce Liban meurtri, est la perte de son identité culturelle qui a automatiquement scindé le peuple en communautés confessionnelles. »

Elle touche un point sensible et essentiel: le Liban n'est pas naturellement voué aux divisions confessionnelles et à la guerre civile. Ces divisions sont aussi le résultat, depuis la fin de la guerre, de la destruction systématique de l'identité libanaise par des intérets à court terme qui rase la mémoire et, avec elle, l'identité.

Dans ce cas précis, c'est Vénus Real Estate qui est sur le banc des accusés. La société prévoit de construire un immense complexe de trois tours gigantesques en centre-ville. Jusqu'ici rien d'inhabituel. Mais en creusant, on s'est rendu compte de l’existence d'un vieux port phénicien du Veme siècle avant JC. Là encore, rien d'étonnant pour une ville riche de 5000 ans d'histoire.

Et, comme de coutume, le promoteur immobilier veut tout bétonner. 

Mais de nombreux citoyens libanais comme Marie-Josée, ne l'entendent pas ainsi et annoncent leur volonté de protéger de l'appétit des promoteurs ce que la guerre n'a pas pu détruire. Un premier article de Marie-Josée avait déjà lancé la bataille contre le projet Venus. La société avait répondu par un argument un peu spécieux : « ce n'est pas un port phénicien », ou en tout cas on n'en est pas vraiment sûr. Dans le doute, il semble très important de bétonner le plus vite possible.

Face à la pauvreté des arguments, Hassan Jaafar, responsable du projet, s'est tout de même donné la peine d'aller débattre en personne dans les commentaires de l'article, ce qui mérite d'être souligné.

Poussé dans ses retranchements, M. Jaafar va jusqu'à soupçonner une conspiration dont les média feraient partie : 

« Si vous lisez attentivement les différents articles, vous remarquerez qu'ils cachent des messages politiques, plutôt que l'annonce d'une trouvaille historique, » déclare-t-il, ajoutant que « cela a créé une situation très embarrassante surtout que les actionnaires de l'entreprise sont des hommes d'affaires libanais estimés qui n’ont aucune présence ou alliance politique. » Pourtant,  le logo de Solidere trône en bonne place sur le site internet juste en dessous de celui de Venus Real Estate (certains actionnaires de Solidere font ou on fait partie d'alliances politiques).

Comme ultime excuse, le promoteur indique avoir proposé un projet de déplacement du site archéologique, toute autre solution selon lui reviendrait à affaiblir la structure de l'édifice. Il cite plusieurs fois l'exemple d'Abu Simbel comme preuve du succès de déplacement de site archéologique. Dans les années 60, l'UNESCO avait sauvé le site en le déplaçant. Il était en effet menacé par la construction du barrage d'Assouan.

Nous sommes en 2012, l'UNESCO est amputée de 22% de son budget, punie pour avoir reconnu la Palestine. Venus Real Estate n'est pas Gamal Abdel Nasser et les tours prévues ne fourniront pas le moindre Ampère, ni le moindre centimètre carré de terre cultivable à la population. 

Non, ce que Venus Real Estate prévoit de faire, ce sont d'immenses appartements de 250 à 1129 mètres carrés, avec, en plus de la vue et de l'inévitable centre commercial supplémentaire, des réponses à d'autres besoins bien spécifiques. Venus Real Estate a en effet pourvu chacun de ses appartements d'une minuscule pièce d'environ 5 mètres carrés appelée « staff room », comprenez "chambre de bonne".

Ici dans le Block A, la Staff room est idéalement situé dérrière la Laundry room:

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Volonté, ferveur et paix sont les maîtres - mots qui marquent la voie et l'élan de la voix de Patricia Atallah qui mixe deux trajectoires, le vocal et l'humain dans un registre musical traditionnel qui célèbre son pays d'origine. Une démarche singulière qui marque l'aventure « Patricia Atallah ».
Rencontre avec la chanteuse libanaise à la voix accomplie qui participera prochainement à un concert collectif intitulé « Escale à Beyrouth », organisé par l'Union Libanaise Culturelle Mondiale, qui aura lieu le 17 mars prochain (les bénéfices iront à l'association des orphelins des martyrs de l'armée libanaise).
La jeune femme nous en dit un peu plus sur l'étendue de son univers vocalo - musical .

 

La voix parlée se transforme en voix chantée, une fascinante métamorphose, parlez-nous de cette "métamorphose" vocale en ce qui vous concerne Patricia Atallah.
Une voix se travaille tout au long d'une vie. En ce qui me concerne, je n'ai pas commencé très jeune, mais j'ai pris conscience que c'est un travail quotidien. 
La voix parlée comme la voix chantée a besoin d'être posée. Le secret n'est pas dans la puissance d'une voix mais dans sa vérité. Pour rester dans le domaine de la fascination, je dirais que la métamorphose vient lorsque la musique arrive comme une vague qui vous emporte pour vous bercer à son rythme et vous entraîne tout naturellement. 

Quelle place y occupe le sacré ?
Pour moi, la musique sous toutes ses formes reste sacrée, tant dans les chants religieux que profanes, tout simplement parce qu' il y a toujours un côté transcendantal grâce à cet instrument unique qui est la voix. 
Nous avons chacun plus qu'une empreinte vocale : pour les interprètes un potentiel inné, mais c'est surtout ce ressenti en chantant ou en écoutant qui peut nous faire vibrer jusqu'à dépasser les limites de l'entendement. Et puisque la musique est mon oxygène, le sacré y est quotidiennement présent, discrètement. 

Une résonance qui vous interpelle musicalement, qui vous touche ?
Je suis constamment à la recherche de la sincérité dans la voix. La voix est le reflet de l'âme comme le souligne Socrate. Je peux rester à écouter une cinquantaine de fois un morceau qui me touche car je peux tout de suite sentir s'il a été conçu à but commercial ou si le morceau est réellement porteur d'un message authentique.

Votre playlist favorite ?
Mes goûts sont à la fois très variés et très ciblés. J'ai une admiration pour le parcours de l'éternelle Dalida ou de la mythique Edith Piaf. A l'international, j'écoute le plus souvent des chansons de Barbara Streisand ou Shirley Bassey.

Plus de détails sur le prochain concert auquel participera Patricia Atallah : https://phenixblanc.net
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